Miniature persane (Negārgarī Irani)


Les thèmes de La miniature persane sont pour la plupart liés à la mythologie persane et à la poésie.


La miniature persane, ce terme dans la sphère iranienne « est un mode d'ornement de manuscrit, à base d'éclat et de couleur, dépourvu parfois d’image.

                                                                                         
                                                                  

Présentation de l'Iran :


L’Iran / La Perse – À la croisée de l’Orient et de l’Occident, l’Iran (la Perse) est l’une des plus anciennes civilisations de l’humanité. Située à l’est du Croissant Fertile, elle fut l’une des premières zones d’installations sédentaires au néolithique et le centre du premier empire universel, fondé par les Perses achéménides au VIe siècle avant notre ère. À l’époque musulmane, elle s’imposa comme la culture majeure de l’Orient, influente jusqu’en Asie centrale et en Inde du Nord. Aujourd’hui puissance régionale, l’Iran contemporain est une mosaïque complexe d’ethnies, d’histoires et d’identités. Terre de religions multiples (zoroastrisme, judaïsme, christianismes arménien et nestorien, mithriacisme, manichéisme, islam), l’Iran est aussi une patrie de la mystique, de la philosophie et du chiisme.     


Culture persane - En guise de prélude:


Admirée pendant des siècles, la culture iranienne est aujourd’hui une grande méconnue: on cite Darius ou Xerxès sans les connaître, la miniature persane n’est qu’une image imprécise, on confond les Arabes et les Persans, et d’une civilisation multimillénaire, on ne retient volontiers que les images brouillées d’une actualité trop immédiate. Pourtant, l’Iran – la Perse – fut un berceau des plus anciennes cultures urbaines de l’humanité au néolithique, le centre du premier empire universel de l’histoire (les Achéménides), la culture majeure et rayonnante de l’Orient musulman, un lieu de naissance, d’épanouissement ou de rencontre des religions, des mystiques et des philosophies. Né dans le sillage du Guide culturel de l’Iran de Patrick Ringgenberg, ce modeste blog n’a pas d’autre ambition que de renvoyer quelques échos d’une culture et d’une histoire qui touchent notre présent comme la source des civilisations.  


Miniatures persanes (Negārgarī Irani):                                                                                                   

 Quelle est l’origine du mot "miniature" ?


Le terme "miniature" ne convient pas à la culture persane. C’est un mot que l’on a désormais expulsé de notre culture de l’art. En revanche, il vaut mieux tout simplement dire "la peinture persane" ou "Negârgari". En fait, le terme "miniature" vient du mot anglais "minimum natural" dont l’histoire est assez longue. Quand la peinture classique de l’Europe apparut en Iran, les artistes décidèrent de faire une distinction entre la peinture européenne et celle de l’Iran, que l’on nomma alors "miniature". Cependant, ce n’est pas un mot convenable puisque, primo, c’est un terme emprunté et secundo, un tableau de miniature est de petite taille. Par exemple, à l’étranger, un petit tableau destiné à la publicité de la boisson Pepsi Cola s’appelle une miniature. Donc, en Iran, les œuvres de grande taille ne sont guère des "miniatures" mais des "peintures persanes" ou bien des "negârgari ».

 Les thèmes de la miniature persane sont pour la plupart liés à la mythologie persane et à la poésie.

Les miniatures persanes utilisent de la géométrie pure et une palette de couleurs vives. L'aspect particulier de la miniature persane réside dans le fait qu'elle absorbe les complexités et qu'elle réussit étonnamment à traiter des questions comme la nature de l'art et la perception dans ses chefs-d’œuvre.

La miniature persane  ce terme dans la sphère iranienne « est un mode d'ornement de manuscrit, à base d'éclat et de couleur, dépourvu parfois d’image.

La miniature persane  représente en elle-même un espace poétique différent avec absence délibérée d'ombre et de perspective, pour réaliser l'union du principe abstrait de l'ornementation, propre à l'art islamique, avec la diffusion de la lumière, propre aux croyances de l'ancienne Perse.

La miniature est toujours peinte à l’intérieur d’un cadre : celui-ci représente une ouverture vers un monde idéal fait de beauté et de rêve. « La beauté est la manifestation de l’éternité ». Aujourd’hui sa taille peut varier et le papier dit « peau d’éléphant » se rapprocherait esthétiquement le plus de celui utilisé dans le passé. Les couleurs doivent être douces dans leur ensemble. De nos jours, on utilise de la gouache ou acrylique pour les surfaces.

La composition classique comprend généralement : un jardin entouré d’une barrière ; de l’eau  - canal, rivière, lac - ; un personnage important sous un kiosque ou un dais ; des courtisans et des serviteurs mais aussi des chasseurs. Les personnages semblent flotter dans l’espace : ils ne sont pas attachés à la terre sur laquelle ils sont peints. Le charme de la miniature persane réside dans son élégance, ses courbes légères et le raffinement de ses très nombreux détails. La miniature ne doit pas s’embarrasser de perspective ou de trop de réalisme : c’est une ouverture vers le rêve, vers « les jardins du paradis ».

La miniature persane laisse beaucoup de place à l’imagination et à la sensibilité de chacun, même si les techniques utilisées sont traditionnelles, et permet de se projeter dans des univers très différents, comme le montrent les miniatures  présentées sur le blog.



Le jardin dans la peinture persane : l'analogie profonde entre la beauté du jardin et la beauté féminine



Le décor de la miniature est le plus souvent un jardin ou une architecture, ou fréquemment une combinaison des deux. Ces décors ne sont pas des arrière-plans interchangeables, ils éclairent la signification de la miniature : ils dessinent son diapason poétique ou son atmosphère herméneutique ; ils forment l’espace acoustique dans lequel peut résonner les modes paradisiaques des symboles.  

Les jardins sont omniprésents dans la culture persane, dont ils révèlent l’intimité et la sensibilité la plus profonde.

Les jardins de la miniature sont riches de toutes ces significations, et rares sont les images sans ruisseaux ou sans bassins. Le jardin est l’une des formes les plus intemporelles de la contemplation : il est comme l’âme de l’âme, un exaucement des désirs, l’éternel retour au paradis.

Il en est de même de la fascination pour l’eau, dont le caractère vital se conjugue à une signification universelle.

La symbolique des jardins est tout aussi importante dans la littérature persane. Saadi (1213/19-1292) a appelé ses deux œuvres majeures Golestân (roseraie) et Bustân (verger). Djâmi, dans la préface de son Bahârestân (littéralement le « pays du printemps »), annonce que son texte est divisé en huit jardins : chacun, « sur le modèle du Paradis, se compose d’anémones aux diverses couleurs et de plantes aux parfums variés » vivant dans un printemps éternel, puisque, ajoute Djâmi, ni l’automne ni l’hiver ne peuvent les flétrir.[9] Chez les poètes persans, les couleurs des fleurs sont comparées à des pierres précieuses (perles, rubis, turquoise, etc.) pour évoquer le caractère immuable et cristallin d’un jardin invisiblement habité par Dieu. Dans les métaphores, les allégories et la symbolique des poètes, le jardin est étroitement associé à la femme et à ses qualités.

Il y a une analogie profonde entre la beauté du jardin et la beauté féminine, comme l’enseigne le Coran en associant les houris aux paradis. La femme est aussi l’innocence printanière, sa subtilité l’apparente à l’eau, sa noblesse au cyprès, son insaisissabilité au miroir de l’âme. Chez Ferdowsi, les thèmes du jardin, du printemps et de la femme se rencontrent fréquemment pour symboliser la bonté, la beauté, un paradis ou un âge d’or.

Le jardin est à la fois un langage et un pacte contemplatifs. La géométrie et les couleurs de la végétation révèlent des qualités de l’Intelligence divine. Le chant des oiseaux a toujours été le symbole de la compréhension mystique

D’une manière générale, l’arbre est une image de l’univers. « Le monde est un arbre aux six côtés » écrit Nezâmî.[19] Le tronc est l’axe de l’immanence divine qui relie tous les mondes à l’Unité. Le feuillage est la multiplicité des mondes qui jaillissent de Dieu. Les racines sont les archétypes divins qui nourrissent la manifestation des créatures. Dans certaines miniatures, le feuillage est automnal : les couleurs des feuilles sont en quelque sorte le symbole des possibilités infinies (« multicolores ») nées sur l’arbre de l’Univers et jaillies de la Lumière divine. 

Dans la miniature, l’omniprésence d’une nature idéale et idéelle est une référence aux conditions mêmes du paradis terrestre.

Aussi, si un jardin ou un tapis de fleurs entoure la plupart des scènes peintes, c’est que la miniature est elle-même un jardin, le terreau d’un accès à l’Invisible, le paysage et le cadre d’une Intellection divine. Elle est le miroir de l’état spirituel originel de l’homme qui peut accueillir les visions de Dieu et transformer l’âme par ces visions. En ce sens, la peinture persane est comme un art sacré, sans origine révélée ni fonction rituelle : un art qui, par ses symboles littéraires et esthétiques, peut être l’un des enseignements les plus explicites sur les principes et les voies mêmes d’une contemplation mystique.


Couleurs:


Les artistes persans utilisaient des couleurs d'origine minérale, non organique (couleurs artificielles) ou bien organique. Il s'agit de l'or, de l'argent, du lapis-lazurite qui est à la base du bleu outremer et que l'on lavait à l'eau. On utilisait aussi de la même façon un vermillon clair, extrait du cinabre naturel. Le jaune était produit à partir de l'arsenic de soufre et le vert à partir de la malachite. Le choix de tel ou tel pigment était dicté par leur valeur, leur vogue, leur quantité disponible.

Quelques pigments corrosifs détruisent le papier à la longue. C'est pourquoi, même conservées dans les meilleures conditions, certaines miniatures s’abîment.


Pinceaux et techniques:


Le pinceau le plus adéquat est un poil d'écureuil. La longue laine du chat persan est aussi utilisée avec succès par les peintres. En assortissant les laines par la longueur, l'artiste utilise seulement des pinceaux dont les poils sont de la même dimension. Il les coud avec un fil, tandis que le tube est constitué d'une plume d'oiseau (le rachis et le calamus) jusqu'au bout étroit. Les pinceaux étaient bien sûr divers, du plus fourni, au plus fin.

La peinture persane était caractérisée par la tradition, c'est pourquoi les artistes utilisaient souvent le pochoir. Celui-ci était fait d'une page blanche superposée sur le dessin à copier dont les contours étaient perforés d'une aiguille. Ensuite il prenait un paquet de charbon écrasé qu'il secouait au-dessus du pochoir. Ainsi les contours du dessin pouvaient se plaquer sur une autre feuille. Le maître traçait le contour au pinceau et n'avait plus qu'à colorier. Avant l'enluminure, il fallait une sous-préparation pendant laquelle les contours étaient à peine visibles. Pour les manuscrits les plus précieux, la miniature n'était pas exécutée directement sur le feuillet. En effet l'artiste contre-collait la feuille qu'il avait peinte sur le manuscrit. Le feuillet était recouvert d'une couche de plâtre très fine délayé dans de la gomme arabique et l'artiste n'avait plus qu'à peindre sur cet enduit3.

Lorsque l'ouvrage était achevé, les feuillets étaient cousus et le manuscrit, relié. Les couvertures étaient faites de cuir estampé recouvert d'arabesques – et au XVe siècle et au XVIe siècle, d'un filetage. À partir de cette époque, il devient à la mode de réaliser des couvertures laquées. Les manuscrits persans étaient donc extrêmement coûteux et nécessitaient le long travail de toute une équipe. La thématique de la peinture persane jusqu'à un certain degré trouve son origine dans la tradition figurative persane des siècles passés. Cela concerne d'abord ce qui passionne depuis toujours les Iraniens, c'est-à-dire la chasse qui est représentée depuis les Achéménides. Les exemples de peinture iranienne préislamique qui sont parvenus jusqu'à nous sont fort rares. Ce sont surtout des œuvres réalisées aux marges orientales du monde persan, comme de la peinture sur bois extrêmement rare et les fresques de Pandjikent.

Le manuscrit persan relié le plus ancien est un traité astronomique composé par Abd ar-Rahman as-Soufi en 1009-1010 et conservé aujourd'hui à Oxford à la Bodleian Library. Cependant ses illustrations, la représentation des constellations, ont une valeur explicative et apparaissent plus comme des dessins coloriés, que des miniatures.

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En savoir plus sur http://www.paradispersans.fr/pages/page-1.html#85zHKRy3Ollmj8BL.99
http://fr.wikipedia.org/wiki/Miniature_persane
Patrick Ringgenberg (extrait de La peinture persane ou la vision paradisiaque, Paris, Les Deux Océans, 2006, p. 129-135)

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